Dossier de presse : Quand le Champagne menace une biodiversité exceptionnelle en vallée de la Marne
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Picardie Nature est une association loi 1901 gérée par un groupe de citoyens décidés à œuvrer ensemble pour la conservation de la biodiversité (flore et faune sauvage) et plus largement pour la préservation de notre environnement en Picardie.
En toute indépendance des pouvoirs politiques et économiques, les membres de Picardie Nature unissent leurs efforts pour agir concrètement en surveillant des espèces menacées, en soignant les animaux sauvages blessés, en faisant respecter les lois sur la protection de la nature, en participant à l’information et à l’éducation du public. Picardie Nature inscrit résolument son action dans la défense de l’intérêt général au profit des générations actuelles et futures.
Picardie Nature : 40 ans de combats pour la protection de la biodiversité.
Notre association, créée en 1970, est membre de France Nature Environnement et agréée par les Ministères de l’écologie et du Développement durable et de l’Education Nationale. Picardie Nature fêtera ses 40 ans en 2010 et compte plus de 680 adhérents.
L’objet de l’association (article 3 de nos statuts)
Œuvrer à la préservation de l’environnement.
Œuvrer à la conservation de la biodiversité (flore et faune sauvage, en particulier les vertébrés) par tous moyens légaux : proposition et mise en œuvre de mesures visant à protéger les individus (sauvetage de couvées, gestion de centre de soins aux animaux sauvages...) et les espèces (mesure de gestion, interventions auprès des élus et autres responsables...).
Contribuer à l’éducation populaire en matière d’étude et de protection de la nature et des oiseaux sauvages et de sauvegarde et d’aménagement rationnel de l’environnement et des sites.
Mener toutes actions et interventions pour faire respecter les lois et décrets sur les espèces protégées, les périmètres sensibles, la protection de la nature, l’urbanisme, dans le cadre de la législation en vigueur.
Réaliser des études, des recherches, des enquêtes sur la flore et la faune sauvage, en particulier les vertébrés.
Contacts :
Contact presse : Yves MAQUINGHEN : 03 62 72 22 52 / 06 33 88 87 51
yves.maquinghen@picardie-nature.org
Visiter notre site Internet : www.picardie-nature.org
Depuis le début des années 1990, le Champagne tente d’étendre son aire de production sur le coteau de Chartèves, dans le Sud du département de l’Aisne, un site exceptionnel pour sa biodiversité (35 hectares). Un protocole d’accord a été établi, avec 25% (8,95 ha) du coteau mis sous un statut de protection et les 75% restants (26,85 ha) détruits par l’implantation des pieds de vignes.
Or cela fait des années que les viticulteurs, représentés pas le Comité Interprofessionnel du Vin de Champagne (CIVC) et l’État ne prennent pas en compte les alertes et avis du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN), du Conservatoire Botanique Natioanl de Bailleul (CBNB), du Conservatoire des sites naturels de Picardie (CSNP) et autres associations.
Le protocole est dénoncé par tous comme insuffisant, les 25 % mis sous réserve sont menacés à court terme, car trop exigus pour assurer la survie des espèces remarquables, trop proches de pratiques culturales incompatibles avec leur pérennité. De plus, 80% des stations de plantes protégées sont en dehors de cette zone de protection, donc vouées à la destruction.
Pourquoi s’obstiner à planter 26,85 ha de vigne, soit 0,08% de l’aire A.O.C. Champagne cultivée, sur un site reconnu pour sa biodiversité exceptionnelle ?
Le coteau du Pseautier de Chartèves est intégré à l’aire géographique d’appellation d’origine Contrôlée (A.O.C.) du vin de Champagne depuis 1924 ;
le 21 juillet 1990 la mairie de Chartèves demande un Arrêté de Protection de Biotope sur le Coteau de Chartèves
25 janvier 1995 un accord est trouvé entre le Préfet de l’Aisne, 3 associations de protection de la nature, le Président de l’Association des propriétaires viticoles de Chartèves, le Président du Comité interprofessionnel des vins de Champagne, le Président de la chambre d’agriculture de l’Aisne.
Cet accord prévoit que 25% (8,95 ha) du coteau plus 10-12 ha de terrain communal soient classés en Réserve naturelle volontaire et les 75% restants (26,85 ha) détruits par la viticulture.
27 février 2002 : la loi "démocratie de proximité" transforme les réserves naturelles volontaires en réserves naturelles régionales (RNR). Le Conseil Régional de Picardie, dans l’attente du remembrement, ne s’est pas encore prononcé sur le devenir de cette RNR.
5 janvier 2006 : la loi d’orientation agricole précise les conditions de dérogation aux interdictions de destruction d’espèces protégées et de leurs habitats. Trois conditions sont désormais nécessaires pour l’obtention de cette dérogation :
1) qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante ;
2) que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle
3) plusieurs critères et éventuellement dans le cas présent : c) Dans l’intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique (...) ;
22 juin 2006 : Le Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel de Picardie a formulé un avis relatif à la "préservation des coteaux calcaires de la vallée de la Marne".
Ce conseil a demandé que "toutes les stations de plantes légalement protégées du Coteau de Chartèves soient exclues du périmètre réservé à la plantation de vignes, et soient intégrées à la future Réserve Naturelle Régionale". Il demande également que "les dernières autres pelouses calcaires de la vallée de la Marne bénéficient de mesures de protection réglementaires durables" (avis disponible sur notre site Internet) ;
9 novembre 2007 : arrêté protégeant non seulement les individus mais également le milieu de vie (aire de reproduction et de repos) de plusieurs amphibiens et reptiles dont le Lézard vert, la Coronelle lisse ou la Grenouille agile présents sur le coteau.
octobre 2008 : Le conservatoire des sites naturels de Picardie et le Conservatoire botanique national de Bailleul ont une analyse des réseaux des pelouses de Chartèves et des environs concernés par l’extension de l’aire de production AOC Champagne.
Ce travail met en évidence :
Un intérêt exceptionnel pour le site de Chartèves (présence de 25 espèces déterminantes (Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique) ; nombreuses espèces animales et végétales protégées et/ou menacées ; 102 invertébrés présents dont 12 lépidoptères remarquables : site unique pour
la Picardie) ;
Un intérêt très élevé pour les sites suivants : le Coteau de Chézy-sur-Marne, la Butte du cosaque à Jaulgonne, les pelouses de Trélou-sur-Marne, la vallée de la Verdonelle , les pelouses de la Butte de Coupigny
Un intérêt élevé pour les sites suivants : le coteau de Mont-Saint-Père, les pelouses de Courcelles, les pelouses de Moulin.
Un intérêt peu élevé pour les pelouses situées sur les communes de Connigis et de Crézancy.
29 octobre 2009 : nouvel arrêté ministériel protégeant non seulement certains oiseaux mais sont également interdits l’altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos ;
Novembre 2009 : constitution d’un comité de pilotage de l’étude relative à la constitution du dossier de demande de dérogation à l’interdiction de destruction des espèces protégées.
Ils sont aussi dénommés savarts dans le Sud de l’Aisne et en Champagne ou larris sur le plateau Picard. Ces milieux secs, arides et calcaires, renforcés par une orientation Sud comme à Chartèves, favorisent une végétation rase et rare en Picardie car favorisant des espèces animales et végétales adaptées aux milieux méditerranéens.
En Picardie, les pelouses sèches ou calcicoles représentent environ 6900 ha (le camp militaire de Sissonne représente à lui seul 3380 ha de pelouses).
La présence de 25 espèces déterminantes (ZNIEFF), de nombreuses espèces animales et végétales protégées et/ou menacées, 102 invertébrés présents dont 12 lépidoptères remarquables font du Coteau Pseautier de Chartèves un site exceptionnel pour la Picardie.
Espèces végétales protégées au niveau national et présentes sur le site :
l’Inule à feuille de saule, rare et quasi menacée d’extinction en Picardie ;
l’Anémone sauvage, très rare et menacée d’extinction en Picardie ;
Herminion caché, très rare et gravement menacée d’extinction en Picardie ;
Ophrys sphegodes, rare et menacée d’extinction en Picardie ;
mais également d’autres espèces non protégées mais menacées de disparition en Picardie.
Exemples d’espèces animales rares et protégées également présentes :
Lézard vert, menacé en Picardie (Vulnérable) ;
Sonneur à ventre jaune, menacé en Picardie ;
Coronelle lisse, menacée en Picardie (Vulnérable) ;
Torcol, Bruant zizi, Alouette lulu, Bondrée apivore...
Ces pelouses calcaires sont une vitrine de la richesse du patrimoine naturel de la Picardie et constituent des milieux atypiques et rares. Tant au niveau régional que national. L’État s’est engagé à stopper l’érosion de la biodiversité pour 2010. La mise en œuvre de la stratégie nationale pour la biodiversité a été renforcée avec le Grenelle de l’Environnement et l’élaboration de 10 plans d’actions avec des objectifs concrets et chiffrés de préservation de la biodiversité (élaboration de la Trame Verte et Bleue, 2% de la surface du territoire métropolitain en aires fortement protégées...).
Que représente l’A.O.C. Champagne ?
32902 ha avec une progression de 120 ha/an.
Dans l’Aisne la surface en vigne est de 2400 ha.
L’extension de Chartèves concerne 26,85 ha soit 0,08% de l’A.O.C. Champagne.
Chiffre d’affaire 2007 : 4,4 milliards d’euros
350000 €/ha en A.O.C. non plantées et 600000 €/ha en vigne A.O.C. Champagne (année 2007).
La vigne est la culture la plus consommatrice de pesticides avec une consommation de 20% des pesticides pour seulement 3% de surface agricole utile. L’utilisation d’hélicoptères pour les traitements est fréquente.
Une étude du PAN Europe et du MDRGF a démontré en mars 2008 « qu’une grande partie des fongicides synthétiques appliquée aux raisins présente d’importants risques pour la santé humaine. Par exemple, les dithiocarbamates, une famille de produits chimiques qui représentent 49% des fongicides appliqués aux raisins, et qui comprennent les pesticides manèbe et mancozèbe qui sont à la fois classés par l’UE comme substances carcinogènes et perturbateurs endocriniens. D’autres fongicides appliqués en plus petites quantités, comme la procymidone, iprodione, le folpet ou iprovalicarbe sont connus pour leurs dangers pour la santé humaine. »
Source : PAN Europe & MDRGF, 2008. Etude VIN. PAN Europe. Message dans une bouteille. Étude de la présence de résidus de pesticides dans le vin. 26/03/2008. 20p.
Une fois aux mains des viticulteurs champenois, le coteau sera « déourlé », c’est-à-dire que l’ensemble de la végétation sera broyé et les arbres coupés pour donner un paysage lunaire : couche de copeaux de bois couvrant le sol et troncs à terre. Ensuite, grues et bulldozers rentreront en action pour assurer les importants terrassements qui seront nécessaires pour implanter les pieds de vignes. La faible épaisseur de sol sera décapée pour faire apparaître le calcaire qui sera nivelé de façon à donner la surface la plus plane possible. Sur les portions les plus pentues, la pente sera cassée par la création d’un important talus sur le haut de la parcelle de façon à abaisser le niveau supérieur de cette parcelle. Son niveau général sera alors ajusté à grand renfort d’apport de craie. La topographie sera alors complètement modifiée.
Durant cette période, le coteau, du moins ce qu’il en restera sera un véritable chantier. Une fois terrassé, c’est-à-dire la craie mise à nue, elle sera recouverte de terre végétale amenée des quatre coins de la région. Elle sera ainsi rendue « propre », indemne de parasites. A ce stade, le coteau aura naturellement perdu ses espèces sauvages inféodées aux boisements et aux friches calcaires. Et nous pouvons indiquer que cette perte sera irrémédiable car la végétation mettra beaucoup de temps avant de se reconstituer.
La plantation finira par avoir lieu. Les structures en métal nécessaires au maintien des pieds de vignes seront ensuite implantées. Le coteau se transformera alors en mer de métal avec ses vagues de piquets et ses milliers de kilomètres de fils de fer qui apparaitront ensuite chaque année de décembre à mars. Les jeunes tiges seront plantées et protégées par des protections en plastique. Le coteau de métal sera égayé de bouts de plastiques bleus, blancs, orange. Le paysage naturel sera transformé en paysage industriel.
Impacts significatifs de la viticulture sur la biodiversité :
Perte des espèces sauvages
Perte de patrimoine génétique
Artificialisation des écosystèmes et uniformisation des paysages
Fragmentation des habitats due notamment :
à des vastes zones uniformisées par les monocultures
à simplification excessive des paysages
à l’utilisation abusive d’intrants
aux pollutions, notamment par les pesticides.
Risque pour l’agriculture d’une diminution de la biodiversité
Pertes massives de pollinisateurs dans certaines régions du monde
Pertes d’espèces apparentées aux espèces cultivées, soit des réserves de gènes. Dans un contexte de changement global, le besoin de diversité génétique est accru pour augmenter les chances de résistance et de résilience.
Perte de diversité intraspécifique : la perte ou l’apparition de tels ou tels allèles peut modifier en profondeur l’évolution d’une espèce et la dynamique d’un écosystème ; par pression de sélection, l’anthropisation fait varier la fréquence des gènes, avec pour effets, la sélection d’individus résistants permettant par exemple à un bio-agresseur de contourner un pesticide, la sélection d’adaptation de nouvelles cultures, la compétition pouvant entraîner l’exclusion ou au contraire la conquête de la culture.
(Source : www.viticulture-oenologie-formation.fr)
Association régionale de protection de la Nature et de l'Environnement
membre de France Nature Environnement, agréée par les ministères de l'Écologie et de l'Éducation Nationale
Picardie Nature - 233 rue Eloi Morel - 80000 AMIENS
- Tél. 03 62 72 22 50
Association loi 1901 déclarée en préfecture le 4 mars 1970 - siège social : 233 rue Eloi Morel - 80000 Amiens
Siret 381 785 120 00043 - APE 9104Z