Médiatisation des naissances hivernales de jeunes phoques gris en Baie de Somme

Note de positionnement de l’association PICARDIE NATURE sur la médiatisation des naissances hivernales de jeunes phoques gris en Baie de Somme

Au cours de cette dernière décennie, les phoques de la Baie de Somme ont fait l’objet d’une médiatisation très importante dans la presse écrite et télévisuelle, sur de nombreux supports de communication à vocation touristique ou commerciale et sur les réseaux sociaux.

Depuis plus de 30 ans, l’association PICARDIE NATURE s’est engagée dans des actions de sensibilisation du public et de protection des phoques, en particulier pendant la période estivale de reproduction du Phoque veau-marin. Ces actions n’ont été possible que grâce au soutien de quelques partenaires publics et privés et surtout par l’implication fortes de bénévoles.

Pendant toutes ces années, l’association PICARDIE NATURE a souvent été sollicitée par des journalistes pour la réalisation de reportages qui permettaient d’expliquer ses actions.

Aujourd’hui la médiatisation constante a fait des phoques de la côte picarde une attraction et a produit une hyperfréquentation touristique sur les plages par les promeneurs, sur l’eau par des embarcations non limitées en nombre y compris dans la Réserve Nationale Naturelle de Baie de Somme où les oiseaux n’y trouvent plus non plus la tranquillité nécessaire à leur cycle biologique.

Cette pression humaine en toute saison constitue en elle-même et de part l’accessibilité des espaces naturels du littoral, une menace directe pour la faune sauvage.

Les bénévoles de PICARDIE NATURE, engagés pour la préservation d’espèces emblématiques de la côte picarde que sont les colonies de Phoque veau-marin et de Phoque gris, se sont concertés pour analyser la situation et ont défini une position sur la médiatisation des phoques sur la côte picarde.

➢ Afin d’assurer la tranquillité des couples mères-petits de Phoque gris dont la reproduction récente, connue et suivie depuis quelques années seulement, est particulièrement vulnérable compte tenu des particularités de l’espèce, des conditions météorologiques de la période de naissance et de la localisation des mises bas à proximité de lieux de passage,

➢ Afin de permettre aux bénévoles de pouvoir effectuer, sereinement et dans la discrétion qui s’impose, une surveillance pendant l’élevage de jeunes blanchons.

L’association PICARDIE NATURE ne donnera pas de suite favorable aux demandes de reportages montrant des images de jeune phoque gris.

Au-delà l’association en appelle à la responsabilité des collectivités, associations et entreprises à vocation touristique pour qu’elles ne diffusent pas d’images de phoques et de messages incitant le public à perturber la tranquillité des animaux. La diffusion d’images inadaptées sur les réseaux sociaux comme des selfies à proximité d’un jeune phoque échoué sur une plage est également propre à entretenir des comportements nuisibles à des individus vulnérables de la faune sauvage.

L’association rappelle qu’un arrêté ministériel du 1er juillet 2011 précise les modalités de protection des phoques :

Article 3- sont interdits sur le territoire national et en tout temps :

I - la destruction, la mutilation, la capture ou l’enlèvement intentionnel incluant les prélèvements biologiques, la perturbation intentionnelle incluant la poursuite ou le harcèlement des animaux dans le milieu naturel
II – la destruction, l’altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux. Ces interdictions s’appliquent aux éléments physiques ou biologiques réputés nécessaires à la reproduction ou au repos de l’espèce considérée, aussi longtemps qu’ils sont effectivement utilisés ou utilisables au cours des cycles successifs de reproduction ou de repos de cette espèce et pour autant que la destruction, l’altération ou la dégradation compromette la conservation de l’espèce en remettant en cause le bon accomplissement des cycles biologiques.

L’association PICARDIE NATURE fait un parallèle entre les situations observées en Baie de Somme et d’autres sites naturels où la fréquentation touristique spontanée ou organisée perturbent gravement des espèces vulnérables.
En Corse, la présence sans limite de bateaux dans la réserve naturelle de Scandola est responsable des échecs de nidification du Balbuzard pêcheur.
A la Réunion, les dérangements incessants des baleines, pendant la période de reproduction et de gestation, a obligé le préfet à prendre un arrêté, en juin 2019, réglementant la présence de bateaux de tourisme dans les zones fréquentées par les baleines à bosse.

L’association PICARDIE NATURE demande aux autorités d’évaluer l’impact des activités touristiques nautiques particulièrement lucratives, qui consistent à montrer des phoques sur les reposoirs et de prendre des mesures adaptées.
L’association Picardie Nature demande aux autorités d’engager une concertation entre tous les acteurs du tourisme en Baie (bateaux, kayak, pirogues…), de l’information (les guides), de la protection (La Réserve, Le Parc Marin, Picardie Nature) afin de décider des actions pertinentes à mettre en place permettant d’assurer la protection des deux espèces et le maintien d’activités touristiques de façon raisonnée et durable.
Cette concertation aurait comme base de discussion :
 Une évaluation de l’impact des activités touristiques sur la faune de la baie,
 Une anticipation du risque du mouvement des phoques vers des reposoirs plus isolés, plus éloignés en fonction aussi des changements naturels géo-morphologiques des chenaux et bancs de sable avec comme risques une fragilisation des activités touristiques ou consécutivement une modification des activités les rendant plus perturbantes encore.
Quid de l’avenir de la Baie en temps que milieu naturel alors que son écologie est déjà menacée par les problèmes d’ensablement ?
Quid du respect du monde sauvage, de sa perception s’il est donné au public l’impression que la Baie de Somme est un parc d’attraction zoologique ?

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